Semaine de 4 jours : les enseignements de l’expérience islandaise

Les études sur la semaine de 4 jours en Islande viennent de paraître et confirment l’intérêt croissant pour ce mode d’organisation du travail. L’Islande, pionnière en la matière, offre un retour d’expérience particulièrement riche, désormais documenté par plusieurs analyses récentes.

Des résultats économiques et sociaux marquants

L’expérimentation islandaise, lancée dès 2015 et officialisée en 2019, a concerné plus de 2 500 salariés, soit plus de 1 % de la population active. Face aux résultats positifs, 90 % des travailleurs islandais bénéficient aujourd’hui d’une réduction de leur temps de travail, passant de 40 à 36 heures hebdomadaires, sans diminution de salaire. Contrairement à d’autres pays, l’Islande n’a pas opté pour une simple réorganisation des horaires mais pour une véritable réduction du temps de travail, en optimisant les tâches et en limitant les réunions inutiles.

Les études montrent que la productivité est restée stable, voire a augmenté dans certains secteurs. Les salariés ont appris à mieux organiser leur temps, à prioriser les tâches essentielles et à limiter les distractions. Le bien-être des travailleurs s’est nettement amélioré : 80 % des salariés concernés se déclarent satisfaits du nouveau modèle, 60 % estiment que leur vie privée s’est améliorée, et le risque de burnout a diminué. Les employés se sentent plus reposés, plus motivés et plus épanouis dans leur emploi.

Un modèle qui inspire à l’international

L’expérience islandaise a suscité l’intérêt de nombreux pays, dont l’Espagne, l’Allemagne ou le Royaume-Uni, qui ont lancé leurs propres expérimentations. Le modèle islandais se distingue par une réduction effective du temps de travail, sans intensification des journées, contrairement à d’autres approches comme celle adoptée en Belgique.

Sur le plan économique, l’Islande affichait un taux de chômage de 3,4 % et une croissance de 4,1 % en 2023 et 1,9% en 2024, elle est l’un des pays les plus dynamiques de l’OCDE.

En France nous pouvons citer par exemple l’entreprise LDLC qui a réduit le temps de travail à 32h et 4jours sur l’ensemble des collaborateurs, y compris les cadres. D’autres exemples comme la biscuiterie Maison Buyère (30salariés) ou encore la fonction publique qui expérimente depuis 2024 la semaine de 4jours sans réduction de temps de travail dont le bilan devrait intervenir dans l’été 2025.

Commentaire sur les résultats

Les études récentes mettent en lumière que la semaine de 4 jours, lorsqu’elle s’accompagne d’une réelle réduction du temps de travail et d’une optimisation de l’organisation, peut améliorer à la fois le bien-être des salariés et la performance économique. Toutefois, la réussite de ce modèle dépend de son adaptation à chaque contexte national et sectoriel. L’Islande et la France sont différents pour de nombreuses raisons : la population (68millions et 386 000 habitants) ; l’économie est très diversifiée en France et plutôt concentrée en Islande (tourisme, pêche et industrie) ; le taux de chômage est presque deux fois moins élevé en Islande (3,5% contre presque 7%…) et surtout le marché du travail est structuré par de très nombreuses PME en Islande et peu de grandes entreprises. On pourrait lister encore de nombreuses différences mais retenons que l’adaptation d’un modèle qui fonctionne en Islande ne serait pas nécessairement fonctionnel dans notre pays. L’Islande diffère de la France de par son nombre d’habitants, 176 fois inférieur, son taux de chômage, la présence d’un tissu d’entreprises majoritairement composé de PME, le modèle n’est donc pas reproductible. Ce qui ne veut pas dire que la semaine de 4jours n’a pas de sens en France, notre inquiétude ici se porte sur la réduction des temps collectif. En effet, le télétravail a montré parfois un mal être des collaborateurs d’avoir réduit les interactions sociales, de passer moins de temps au sein de l’entreprise etc… Si la productivité est maintenue avec un temps de présence réduit, n’y a-t-il pas un risque de diminuer les interactions avec les autres afin de s’enfermer chacun dans son travail personnel ? Le stress lié à la cadence nécessaire pour fournir un travail égal n’est-t-il pas augmenté ? Lorsque l’on sait que les facteurs de vie sociale et relationnelle sont fondamentaux dans l’intérêt et l’engagement porté par les salariés dans leur travail, nous pouvons questionner les effets d’une telle mesure sur le bien être réel des collaborateurs.

Sources :

https://www.lesechos.fr/pme-regions/actualite-pme/la-delicate-revolution-de-la-semaine-de-4-jours-2164549

https://www.science-et-vie.com/cerveau-et-intelligence/islande-semaine-de-4-jours-192517.html

https://www.tresor.economie.gouv.fr/PagesInternationales/Pages/6f41087a-1230-4236-b441-2a95576a4407/files/692a8e51-aee7-4749-b667-bb514aad8d26

https://www.lemonde.fr/emploi/article/2024/05/09/chez-ldlc-les-cadres-en-forfait-jours-aussi-sont-passes-a-la-semaine-de-quatre-jours_6232310_1698637.html

https://www.francetvinfo.fr/economie/entreprises/semaine-de-quatre-jours-ou-en-est-la-france_6843590.html